Résultats & impact 8 avril 2025
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La pandémie ne sera pas sans conséquences pour la conservation de la faune sauvage en Afrique et les communautés qui en dépendent

Effondrement du tourisme, réduction des financements, limitations des opérations des agences de conservation sur le terrain : c’est l’effet boule de neige des restrictions de mouvements de personnes durant la crise sanitaire. « La crise a mis en évidence l’importance du tourisme pour la conservation en Afrique, mais aussi le danger de trop s’appuyer sur ses financements, qui ont toujours été insuffisants »,révèle Peter Lindsey, biologiste de la conservation travaillant pour Wildlife Conservation Network, premier auteur de l’étude.
Agences de conservation, autorités nationales de la faune, propriétaires fonciers, ONG de conservation ont ainsi dû, pendant la crise, se concentrer sur les activités les plus critiques pour éviter les pertes d'emplois locales et garantir le maintien des services essentiels.
Quant aux communautés vivant à proximité d'aires protégées, « celles qui avaient investi, sur les conseils et l’appui des ONGs de conservation, dans le tourisme de faune, ont aujourd’hui tout perdu » , poursuit Alexandre Caron, écologue et vétérinaire, chercheur au Cirad et à l’UEM (Universidade Eduardo Mondlane) au Mozambique. Ces communautés étaient déjà parmi les plus pauvres et les moins considérées par les Etats.
Un appauvrissement qui engendre une menace directe pour les aires protégées situées en périphérie. « Appauvries, les communautés vont dépendre davantage des ressources naturelles, pour assurer leur sécurité alimentaire, notamment de la viande de brousse ». Or dans les points chauds d'émergence de maladies comme les forêts d'Afrique centrale, plus de chasse signifie aussi plus de contacts entre humains et animaux et donc plus de risques d’émergences de maladies.
Investir davantage dans la protection du capital naturel
Alors que faire ? Les auteurs de l’étude appellent les gouvernements africains à investir davantage dans la protection de leur capital naturel, en prenant en considération la valeur de la nature. Ils invitent les pays Africains émergents (Kenya, Afrique du Sud) à développer un tourisme local ou régional les rendant moins dépendant du tourisme international.
Il s’agit de trouver des moyens d’impliquer les communautés vivant à proximité des aires protégées dans leur gestion. « Actuellement, les populations qui vivent en périphérie des parcs subissent des pertes importantes liés à la faune sauvage : des éléphants qui détruisent leurs champs, des lions qui dévorent leur bétail. Elles payent un lourd tribut à la conservation, mais en tirent peu des bénéfices ».
Pour rétablir une forme d’équilibre, les auteurs appellent à l’aide internationale. « Les pays développés pourraient émettre des dettes pour la nature, rémunérer les communautés comme gardiennes de la nature et encourager financièrement les pays pour préserver et gérer les terres sauvages, en échange des services environnementaux mondiaux qu’elles procurent ».
Concilier développement et conservation
Les auteurs expliquent en effet qu’objectifs de développement et objectifs de conservation ne sont pas antinomiques. « Il s’agit de positionner les aires protégées et leurs périphéries comme des centres névralgiques de développement et de services aux populations locales. Et d’impliquer les communautés en tant que parties prenantes dans la gouvernance et la gestion de ces aires », notamment par le biais d’activités touristiques éco-responsables. Dans ce domaine, Alexandre Caron invite toutefois à la prudence : « le tourisme ne peut pas se développer partout et les modèles économiques touristiques actuellement majoritaires favorisent surtout les Etats et tours opérateurs, et non les communautés locales. Au Cirad, avec nos partenaires, nous misons sur l’agriculture dans un contexte de conservation ».
Donner des droits aux communautés tout en respectant et protégeant la nature
Pour cela, les communautés doivent bénéficier de droits sur les terres en question, ce qui n’est pas le cas actuellement. « Face à la multitude de crises actuelles et aux changements globaux, dont climatique, les communautés locales doivent diversifier leurs modes de vie, tout en conservant leur culture et leurs pratiques agricoles traditionnelles, qui sont la base de leurs revenus et de leur bien-être ». Ces pratiques doivent s’ancrer sur un accès à la terre solide et utiliser les ressources naturelles de manière durable. « C'est le cœur de nos activités de recherche ».
La destruction des habitats, à travers le changement d’usage des terres, est en effet la 1ère cause de perte de biodiversité, selon le dernier rapport mondial de l’IPBES. Les conserver est donc primordial. « Il est également fondamental de réglementer et surveiller les pratiques commerciales d'espèces sauvages, car elles augmentent considérablement le risque d’émergences de maladies ».
Référence
Lindsey, P., Allan, J., Brehony, P. et al. . Nat Ecol Evol (2020)